mardi 14 février 2012

Attention, le pâté nuit à la biodiversité


Pour tout touriste de passage, les premiers pas en Nouvelle-Zélande sont généralement assez originaux. En effet, aux questions classiques des formulaires d’entrée sur un territoire (Envisagez-vous de réaliser des actions terroristes pendant votre séjour, cher monsieur ?) viennent s’ajouter des questions plus classiques mais paradoxalement moins courantes, du genre « Transportez vous des chaussures de randonnées, des objets en bois, etc… ? ». Résultat des courses, le passage à la douane se termine quasi systématiquement par une ouverture de sacs, pour vérifier l’état de propreté de vos semelles ou pour vous faire jeter toute nourriture susceptible de transporter des bactéries à risques pour le pays (ce qui m’a valu lors de ma première venue dans le pays d’assister au triste spectacle donné par un français contraint d’ingérer à la va-vite un pot de foie gras à la main au niveau de la douane). Bref, le message se veut clair d’entrée de jeu, il ne s’agit pas de déconner avec la biodiversité néo-zélandaise !

En effet, le pays jouit d’un patrimoine naturel unique. Cela s’explique assez simplement : la Nouvelle-Zélande est un pays très isolé géographiquement, et que l’homme a colonisé tardivement : les Maoris sont arrivés ici il y a environ 1 000 ans et les Européens 750 ans plus tard. Cela a permis le développement d’une faune et d’une flore endémiques extrêmement variées et particulières ; ainsi, on estime que 80% des végétaux qui poussent sur ces terres ne se trouvent qu’ici, incluant notamment la fougère argentée, qui sert de symbole au pays et à son équipe de rugby. Concernant le monde animal, le pays a la particularité de n’abriter initialement que 3 espèces de mammifères terrestres, à savoir 3 races de chauves-souris frugivores et aucune espèce de serpents, ce qui a laissé les oiseaux sans réels prédateurs et a permis la survie de nombreuses espèces, notamment des variétés incapables de voler, comme le Wéka (photo çi-dessus) ou le Kiwi, ou encore le seul perroquet carnivore et capable de vivre en haute montagne au monde, le Kea (photo çi-dessous).

L’insularité a protégé cet écosystème pendant des siècles, mais, parce qu’il en faut un, ce joli tableau a naturellement été quelque peu entaché, au cours du dernier millénaire. Tout d’abord, les Maoris, à leur arrivée, ont jugé bon de venir s’installer accompagnés de leurs chiens ainsi que de souris, c’est qu’il fallait bien occuper les enfants et pouvoir de temps en temps céder à leurs caprices quand ils demandaient pour leur anniversaire un petit animal de compagnie. Par la suite, les colons britanniques ont ramené dans leur besace tout un tas d’espèces animales et végétales, certaines involontairement, et d’autres dans le but de développer l’agriculture. Bien évidemment, ces intrusions ont engendré un bouleversement important mettant en péril certaines espèces et anéantissant totalement de nombreuses autres. 

L’exemple le plus significatif est celui du possum (renard phalanger en français, cf notre post du 26 Décembre), petit animal venu d’Australie qui a fait l’objet d’un élevage important dans le but de récupérer ses poils pour en faire de jolis manteaux, très chics à une époque maintenant révolue. Par la suite, dans les années 90, les lobbys anti-fourrures ont considérablement affaiblit ce secteur économique, réduisant l’élevage à quasi-néant, mais le mal était fait. Les possums, dotés de capacités de reproduction à en faire pâlir de jalousie nos lapins de garenne, se sont multipliés à très grande vitesse. Désormais, ils dévorent quotidiennement à eux seuls près de 20 000 tonnes de végétation par jour, principalement des jeunes pousses, ce qui met en danger la survie de nombreuses espèces végétales ainsi que celles des animaux qui avaient pour habitude de les consommer. A tel point que le possum est maintenant considéré comme l’ennemi numéro 1 dans ce pays : des pièges sont posés partout, il n’est pas rare au détour d’une rando de croiser un possum mort pendu à un arbre, et un néo-zélandais n’hésitera pas à donner un coup de volant bien ajusté pour aller écraser un possum qui traverse la route (ne pas le faire serait presque considéré comme un acte de trahison !).

Pour couronner le tout, les gouvernements successifs ont introduit de nouvelles espèces, notamment des furets, dans le but de disputer aux possums leurs espaces de vie et de s’y attaquer : au lieu de cela, celui-ci crée encore plus de dégâts, notamment dans les populations d’oiseaux. Jolie bourde, qui met les autorités plutôt mal à l’aise et justifie maintenant l’excès de zèle dont ils font preuve quant aux contrôles à la frontière ! On m’excusera, mais je ne comprends toujours pas en quoi l’importation d’un malheureux bout de pâté pourrait à terme engendrer la disparition d’une variété de fougère ou d’oiseau !

1 commentaire:

Clemsouille a dit…

Bravo pour cet article !!!
Bisous les chouchous